Jamais on a autant parlé du taux d’usure d’un crédit. Mais, savez-vous à quoi il sert ? Comment il est calculé ? Sur quels crédits il s’applique ? Pourquoi le taux d’usure pose un problème ? Comment parvenir à le diminuer ?
A quoi sert le taux d’usure ?
Définition du taux d’usure
Le taux d’usure d’un crédit ou seuil d’usure est le taux maximum légal à ne pas dépasser par une banque. Au-delà de ce seuil, la banque n’est pas autorisée à accorder un crédit. Ça constitue même un délit. L’établissement de crédit s’expose à un emprisonnement de deux ans et/ou une amende de 300 000 €, selon l’article L341-50 du Code de la consommation.
Lien taux d’usure et TAEG
Votre crédit a un coût. Il s’agit de la somme des intérêts, des cotisations d’assurance de prêt, des frais de garanties (pour un crédit immobilier), des frais de dossier de la banque et des honoraires de courtage si vous faites appel à un courtier en crédits. La somme de ces frais constitue le coût total de votre crédit. Toute offre de prêt mentionne obligatoirement ce coût, en pourcentage du montant emprunté. C’est le taux annuel effectif global (TAEG). Donc, le taux d’usure est le TAEG à ne pas dépasser pour un crédit. Si le TAEG du prêt est dépassé, on parle de prêt usuraire.
Un taux d’usure protecteur
Le taux d’usure a pour objectif de protéger les emprunteurs contre une proposition de crédit trop chère. Ce seuil vise à éviter de placer l’emprunteur dans une situation financière délicate.
Comme se calcule le taux d’usure ?
Une moyenne des TAEG
La Banque de France réalise une enquête auprès des organismes prêteurs. Puis, elle calcule une moyenne des TAEG pratiqués par les banques, au cours du trimestre précédent. Cette moyenne est augmentée d’un tiers pour donner les taux d’usure. Ce mode de calcul est règlementé. Les taux d’usure sont publiés au journal officiel. Les seuils d’usure au 1er mai sont accessibles sur le site de la Banque de France.
Actualisation des taux d’usure
En principe, la Banque de France révise les taux d’usure chaque trimestre. Mais, depuis le 1er février 2023, la mise à jour des taux d’usure est mensuelle. Toutefois, cette mesure est provisoire jusqu’au 1er juillet 2023. Dans le contexte de hausse continue et forte des taux d’intérêts, l’actualisation mensuelle a pour objectif de coller au mieux à la réalité des taux. Dans les faits, cette nouveauté ne produit aucun effet sur un marché du crédit immobilier bloqué en 2023.
Sur quels crédits s’applique le taux d’usure ?
Taux d’usure et crédits à la consommation
Le taux d’usure d’un crédit à la consommation varie selon son montant. Il n’y a pas de notion de durée de remboursement. Par exemple en mai 2023, le taux d’usure d’un crédit renouvelable inférieur à 3000 € s’élève à 21,16 %. En principe, le taux d’intérêt hors assurance de ce type de prêt tourne autour de 20 %. En revanche, pour un prêt auto de plus de 6000 €, le taux d’usure en mai 2023 est de 6,40 %.
Taux d’usure et crédits immobiliers
Les taux d’usure des crédits immobiliers à taux fixe diffèrent selon la durée de remboursement. Le montant emprunté n’entre pas en ligne de compte. La logique est simple : plus la durée de prêt est longue, plus les taux d’intérêts fixes sont élevés. Ainsi, le TAEG d’un prêt immobilier sur 25 ans ne doit pas dépasser 4,52 % en mai 2023.
Mais, il existe un unique taux d’usure pour les prêts immobiliers à taux d’intérêt variable, quelle que soit la durée de remboursement. Donc, actuellement le taux d’usure applicable sur ces prêts est fixé à 4,31 %.
Enfin, les prêts relais ont un taux d’usure spécifique et unique. En mai 2023, le taux d’usure d’un crédit relais est de 4,52 %.
Taux d’usure sur les rachats de crédits
Les taux d’usure concernent tous les rachats de credits. Pour le rachat de crédits à la consommation, les taux d’usure sur les prêts à la consommation s’appliquent. Pour le rachat de crédits à la consommation et crédits immobiliers (au moins 60 %), les seuils d’usure sur les crédits immobiliers s’appliquent. En revanche, si la part des crédits immobiliers est inférieure à 60 % du montant du rachat, les taux d’usure sur les crédits à la consommation sont la règle.
Pourquoi le taux d’usure pose un problème en 2023 ?
Cercle infernal hausse des taux et taux d’usure
Les taux d’usure des crédits immobiliers et des rachats de crédits à dominante immobilier empêchent bon nombre de particuliers d’obtenir un financement. La cause principale réside dans la hausse forte et continue des taux d’intérêts depuis des mois. Actuellement, les intérêts d’emprunt pèsent de plus en plus lourdement dans le coût total d’un crédit immobilier. Ajoutez-y les cotisations d’assurance de prêt. Le taux d’usure à respecter est déjà dépassé. Tant que les taux d’intérêts ne se stabiliseront pas, les emprunteurs seront bloqués par les seuils d’usure.
La problématique s’applique également au rachat de crédits à dominante immobilier (60 %).
Quant aux crédits à la consommation et rachat de crédits, la tendance est identique. Les taux d’intérêts ont augmenté. Aussi, les banques spécialistes ont durci leurs critères d’octroi, à commencer par la hausse du reste à vivre par personne.
Une révision mensuelle des taux d’usure insuffisante
L’actualisation mensuelle des taux d’usure a permis de s’adapter au marché. Mais, c’est loin d’être suffisant pour débloquer l’accès aux crédits. Cette mesure a même accéléré la hausse des taux d’intérêts.
Un mode de calcul des taux d’usure des crédits immobiliers inadapté
Les courtiers réclament, depuis des mois et à juste titre, la refonte du mode de calcul des taux d’usure sur les crédits immobiliers. La Banque de France prend en compte les TAEG constatés, en général 3 mois après la signature d’un compromis de vente. Or actuellement, en l’espace de 3 mois, les taux d’intérêts grimpent. Dans un contexte où les taux d’intérêts progressent autant, un décalage d’1 ou 2 mois a de fortes répercussions.
Des taux d’intérêts qui ne cessent d’augmenter
Les taux d’intérêts des crédits ont augmenté à un rythme très soutenu depuis le début de l’année 2023. Toutefois, la Banque Centrale Européenne (BCE) a relevé ses taux directeurs de 0,25 point début mai 2023 de manière légèrement plus modérée. La bataille pour ramener l’inflation à 2 % est loin d’être gagnée. A priori, la BCE est déterminée à poursuivre sa politique de hausse des taux, en évitant tout risque de récession.
« Nous nous dirigeons vers des décisions plus délicates, mais nous serons courageux et nous prendrons les décisions nécessaires pour ramener l’inflation à 2% »
Christine Lagarde – Présente de la BCE – 19/05/2023
Par ailleurs fin avril 2023, l’agence de notation Fitch a abaissé la notation de la dette française, passant de AA à AA-. Cette note était connue depuis 6 mois.
« L’impasse politique et les mouvements sociaux (parfois violents) constituent un risque pour le programme de réformes de Macron et pourraient créer des pressions en faveur d’une politique budgétaire plus expansionniste ou d’un renversement des réformes précédentes »
Agence de notation Fitch le 29/04/2023
Mais, cette notation est un indicateur de risques pour les acheteurs de la dette française. Or, le taux de l’emprunt d’état (OAT 10 ans) qui sert de référence aux banques pour fixer les taux des crédits immobiliers risque de continuer sa progression.
Comment baisser le taux d’usure des crédits immobiliers ?
Une assurance de prêt immobilier individuelle
Choisir une assurance emprunteur en délégation (en opposition à une assurance groupe de banque) permet de réaliser d’importantes économies surtout si vous êtes jeune. Toutefois, ce choix n’est pas judicieux si vous avez des pathologies ou au-delà de 55 ans. Le gain réalisé permet parfois de diminuer le TAEG de votre crédit immobilier. Mais, les banques exigent une assurance de prêt et imposent souvent leurs contrats. 85 % des assurance de prêts sont des contrats groupe des banques. On mesure combien il est difficile de faire accepter une assurance emprunteur individuelle, malgré la loi Lagarde de 2010. La seule possibilité est de résilier à tout moment votre assurance de crédit immobilier, une fois l’offre de prêt signée.
Emprunter sur une durée plus courte
Les taux d’intérêts des crédits augmentent avec la durée de remboursement. Vous avez la possibilité d’augmenter votre apport personnel et ainsi réduire la durée de votre prêt immobilier. De cette manière, vous bénéficierez d’un meilleur taux immobilier. Cependant, votre taux d’endettement risque d’augmenter. Il ne doit pas dépasser 35 % de vos revenus, assurance emprunteur incluse.
Prêts aidés
Les prêts aidés, en complément d’un prêt immobilier classique, sont une bonne solution pour contenir le coût de votre prêt immobilier. Les prêts aidés sont les Prêt à Taux Zéro (PTZ) pour l’achat d’un logement neuf et ancien avec des travaux. Vous êtes peut-être éligible au prêt 1% logement par votre employeur. Les PEL et CEL sont également une piste.
Mais, il faut rester vigilant sur l’assurance emprunteur de ces prêts qui sont souvent chères. Par ailleurs, les prêts aidés ont des durées maximales d’emprunt souvent différentes, ce qui entraine une hausse de la mensualité globale. Or, vous ne devez pas dépasser un endettement de 35 % de vos revenus, assurance de prêt incluse.
En conclusion, le taux d’usure d’un crédit est protecteur mais son mode de calcul montre de plus en plus ses limites pour l’obtention d’un crédit immobilier en particulier. La problématique des taux d’usure va continuer à se poser dans les mois à venir, tant que les taux d’intérêts augmentent fortement. La seule question à se poser est : avons-nous atteint le pic de la hausse des taux immobiliers ? Rien n’est moins sûr.
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